UFC-Que Choisir Clermont-Ferrand

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PRIX DU BIO

     Plus cher chez les spécialisés, sauf pour les fruits et légumes

 L’UFC-Que Choisir a renouvelé son étude sur les prix des aliments bio. Sans surprise, les produits alimentaires bio restent bien plus chers que leurs équivalents conventionnels. Notre enquête met aussi en évidence l’ampleur des différences au sein même du bio, selon les rayons et les magasins.

Comme en 2017, nos enquêteurs bénévoles sont allés en magasins relever un échantillon de tarifs d’aliments labellisés bio. La collecte a porté sur un panier de 39 produits reflétant la consommation des Français : fruits et légumes frais, épicerie sucrée et salée, crèmerie, viandes, boulangerie, boissons et aliments pour bébé (1). Bilan, ils restent nettement plus chers (+80 %) que leurs équivalents conventionnels, à 155 € contre 86 € en moyenne, hors de portée d’une partie de la population. Ceci dit, l’écart entre les deux se réduit notablement, le prix du bio augmentant nettement moins vite que celui du conventionnel.

Par ailleurs, les niveaux de prix peuvent varier notablement, selon les produits et l’enseigne. Ainsi, les magasins spécialisés proposent des fruits et légumes moins chers que la grande distribution : le panier bio y coûte 25 € chez les premiers, contre 31 € chez la seconde. Du fait de sa taille, la grande distribution rencontre des difficultés logistiques pour gérer ces produits plus fragiles, et négocier des quantités modestes avec une multiplicité de petits fournisseurs.

En revanche, ce que la grande distribution sait faire, c’est négocier des volumes importants de produits secs ou emballés, facilement stockables et à durée de conservation longue. Elle reprend donc l’avantage sur les produits d’épicerie sucrée ou salée, les boissons, les produits laitiers, les viandes, le traiteur, etc., à 102 € contre 144 € chez les spécialisés. Au total, la grande distribution propose un panier moins cher (à 133 €) que les spécialisés (à 169 €, soit 27 % de plus). Un écart équivalent à celui de 2017.

NOTRE ENQUÊTE PRIX

Les supermarchés sont moins chers, mais…

Sans surprise, les grandes surfaces proposent un panier bio moins cher que les magasins spécialisés : elles traitent de plus gros volumes, ont des espaces de vente plus importants et une logistique efficace. Pour autant, la note pourrait être moins salée, comme le montre notre étude réalisée sur les fruits et légumes en supermarchés. Par ailleurs, malgré des tailles de magasins inférieures, les enseignes spécialisées sont mieux approvisionnées, avec un large choix de produits.

        COÛT DE NOTRE PANIER

COÛT DE NOTRE PANIER FRUITS ET LEGUMES

mieux vaut acheter les fruits et légumes en magasins bio

Les enseignes bio proposent des fruits et légumes moins chers que la grande distribution. Du fait de sa taille, cette dernière rencontre des difficultés logistiques pour gérer ces produits plus fragiles et traiter avec moult petits fournisseurs. Mais les grandes surfaces savent négocier de gros volumes de produits secs ou emballés, faciles à stocker et se conservant longtemps. Et elles font des promotions que ne se permettent pas les magasins bio. Elles reprennent donc l’avantage sur l’épicerie sucrée ou salée, les boissons, les produits laitiers…

COÛT DE NOTRE PANIER EPICERIE

NE REGARDER QUE LE PRIX, C’EST DÉNATURER LE BIO

Au classement par enseignes, le panier de 39 produits bio coûte moins cher dans les supermarchés traditionnels. Mais ce critère est à manier avec précaution. Il faut éviter que la filière bio ne bascule dans une guerre des prix semblable à celle qui fait rage dans les filières conventionnelles et met en difficulté des transformateurs et beaucoup d’agriculteurs. Du lait bio vendu moins cher que du lait non bio, même local (comme on l’a vu chez Leclerc), c’est incompréhensible. On peut toutefois déplorer que manger bio soit si onéreux, voire inaccessible pour les foyers modestes. Le patron de Biocoop, Pierrick De Ronne, en est conscient. « Nous avons retravaillé nos tarifs. C’est difficile, car notre cahier des charges est très exigeant. Chez Biocoop, nous préférons parler de prix justes, pas de prix bas. Pour autant, est-ce aux distributeurs de résoudre le problème d’accessibilité à une alimentation de qualité pour tous, qui est un problème politique ? »

COÛT NATIONAL DE NOTRE PANIER BIO PAR ENSEIGNES

(1) Le panier étudié est constitué de 39 produits reflétant la consommation des Français en produits alimentaires bio : fruits et légumes frais, épicerie sucrée et salée. Entre le 26 janvier et le 9 février 2019, les bénévoles de l’UFC-Que Choisir ont relevé les prix du bio dans 712 magasins spécialisés. Les paniers bio et conventionnels ont également été relevés de façon automatique sur les sites drives de 3 350 grandes surfaces. Au total, 4 062 magasins ont été enquêtés, et 149 966 prix analysés.

L’ENQUÊTE LOCALE

  Nos bénévoles enquêteurs ont enquêté dans plusieurs magasins BIO du Puy De Dôme.

   Le moins cher

   Le plus cher

Ville Enseigne Magasin Adresse Prix du panier Panier de fruits et légumes Panier hors fruits et légumes
Aubière
L’Eau Vive L’Eau Vive 23 Avenue de Cournon 175,00 € n n H
Satoriz Satoriz 15 Avenue Du Roussillon 154,00 € HH HH
Clermont-Ferrand
Le Grand Panier Bio Le Panier Bio 30 Boulevard Jean Jaurès 169,00 € H H
Le Grand Panier Bio Le Grand Panier Bio 19 Avenue De L’Agriculture 174,00 € H H
Cournon D’Auvergne
Biocoop Biocoop L’Andesite 20 Avenue D’Aubière 160,00 € HH HH
Lempdes
Biomonde Helichryse 29 Rue De La Rochelle 168,00 € n H
Issoire
Indépendants Biologiquement Votre 8 Rue Yves Lamourdedieu 173,00 € H H
La Vie Claire La Vie Claire 37 Place De La République HH

 

GRANDE DISTRIBUTION

Une marge excessive sur les fruits et légumes

Si la grande distribution assure qu’elle ne veut pas entraver la croissance du bio, elle continue pourtant de prélever une marge excessive sur les fruits et légumes. L’UFC-Que Choisir l’avait déjà dénoncé il y a deux ans, mais la situation n’a guère évolué. Nous avons évalué, comme en 2017, sa marge brute (1) sur un panier représentatif de 24 d’entre eux. En conventionnel, cette marge est déjà nettement plus importante que pour les autres denrées alimentaires. En bio, elle explose. Pour une dépense annuelle d’un ménage en fruits et légumes de 379 € en conventionnel, le montant atteint 657 € en bio : la marge perçue par les grandes surfaces passe de 173 € à 287 €, car s’ajoute une « surmarge bio » de 114 €. Cette surmarge est, en moyenne, de 75 % supérieure à la marge du conventionnel, mais elle varie selon les produits. Ainsi, elle est de « seulement » + 22 % sur le melon, un produit d’appel, tandis qu’elle grimpe à + 149 % pour la pomme golden, très vendue, et qu’elle s’envole à + 165 % pour le poireau, disponible toute l’année. Les enseignes réfutent toute plus-value indue, tout en reconnaissant que les taux de marge appliqués diffèrent selon les produits, leur disponibilité, les saisons et les stratégies. « Sur la banane, qui est le premier fruit consommé en bio, la marge est très restreinte », déclare Benoît Soury, de Carrefour. Casino explique que ses marques propres sont seulement 20 % plus chères en bio. Il est donc possible de moduler les marges pour réduire les prix.

(1) Prix de vente du produit moins son prix d’achat.

La marge des distributeurs double le prix de la pomme Golden Bio

Source : réseau des nouvelles des marchés, ministère de l’Agriculture.

 

                                 NE PERDRE NI SON ÂME… NI LES CLIENTS !

Le bio est-il menacé par son succès ? Près de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires sont encore attendus cette année : les aliments labellisés gagnent des parts de marché à un rythme soutenu. De quoi enthousiasmer, et inquiéter, ses promoteurs. Cette visibilité nouvelle, on la doit en partie à la grande distribution, qui croque aujourd’hui la moitié du gâteau – contre un tiers en magasins spécialisés. Mais cette démocratisation n’est pas sans risques. Les militants, qui portent une filière restée confidentielle durant des décennies, voient débarquer, non sans appréhension, les poids lourds de l’alimentaire dans leur pré carré : agriculteurs fraîchement convertis, coopératives de grande taille, multinationales qui déclinent leurs gammes en bio, géants de la distribution en quête de relais de croissance… Pour ces nouveaux venus, la tentation est grande de réclamer des critères moins rigoureux, afin d’accroître les volumes et de faire baisser les prix. « Ils souhaitent faire comme dans le conventionnel, les pesticides en moins, reproche un acteur historique du bio. Ils n’ont pas intégré “l’esprit du bio” dans sa globalité, donc ils se cantonnent au strict cahier des charges ou essaient d’exploiter ses failles pour tirer les exigences à la baisse. » .

PRESSION SUR LES FOURNISSEURS

Dans les faits, les GMS ont besoin de volumes importants. Face au déficit de produits agricoles labellisés, les fournisseurs bio sont encore en position de force. Mais un premier signal d’alerte a été tiré : « La grande distribution les met sous forte pression », avec des demandes de baisses de prix, alors même que le marché est porteur, s’inquiétait le Synabio en janvier. Les pratiques de négociation sont « plus agressives », confirme un fabricant de pains et de viennoiseries bio depuis 40 ans, tandis qu’un producteur de préparations sucrées et salées s’inquiète de la concurrence des grandes marques nationales et internationales. « Elles sont mieux connues des consommateurs. Or, elles n’ont pas développé tout ce qui va autour du bio, contrairement à nous », regrette-t-il. Un autre, spécialisé dans la confection de confitures, constate : « Il y a une guerre entre GMS et distributeurs traditionnels, et nous sommes coincés entre les deux. Les GMS ne veulent pas rendre le bio plus accessible, mais plus compétitif. Les niveaux de prix sont encore corrects mais, à force de chercher du bio à tout prix, elles vont finir par en importer. Le risque est d’avoir du bio industriel qui vient de loin. » La mondialisation tendrait à la dégradation des exigences. Et c’est bien là le danger pour la filière. « S’il faut du volume, donc du rendement, on calque la production sur les méthodes du conventionnel, ce qui est un non-sens total », proteste la présidente de Bio Consom’acteurs, Sophie Lakhdar. « La croissance ne peut pas être effrénée, concède Florent Guhl, de l’Agence bio. L’enjeu est de créer un modèle qui continue à être séduisant pour tout le monde. S’il n’est pas rémunérateur pour le producteur, ni satisfaisant pour le consommateur, il s’arrêtera. »

BIO ET SIGNES OFFICIELS

Dans l’esprit du consommateur, le bio va souvent de pair avec la protection de l’environnement et de la biodiversité, le commerce équitable, un approvisionnement local et le bien-être animal. Des attentes auxquelles le cahier des charges actuel ne répond que partiellement. Il faudrait faire évoluer le label bio européen ou le français AB. Mais toucher à l’Eurofeuille nécessite l’accord de tous les pays de l’Union européenne. De son côté, l’État français, propriétaire du label AB, prône le statu quo. Pour le directeur du groupement de producteurs Biolait, Théophile Jouve, « le logo AB  et l’Eurofeuille sont connus des consommateurs, ne discréditons pas ce travail. » La filière préfère donc combler les lacunes. Ainsi, Biolait complète le cahier des charges bio par un volet qualité et deux certifications de commerce équitable. La Fnab est, elle aussi, tentée par la piste de labels privés plus contraignants, qui respecteraient le « contrat social » avec le consommateur. Il en existe depuis longtemps, à l’instar de Bio Cohérence, Demeter ou Ensemble (Biocoop). Toutefois, la multiplication des logos pourrait brouiller le message.